Les sanctions des États-Unis détruisent l’industrie pétrolière du Venezuela

Nous traduisons ici deux articles qui évoquent les conséquences du blocus des Etats-Unis contre l’industrie pétrolière vénézuélienne. La source de ces articles est l’agence de presse britannique Reuters, peu suspecte d’anti-américanisme ni de soutenir la Révolution bolivarienne. Le portrait dressé est révoltant. Rappelons que 98% des devises du Venezuela est généré par l’industrie pétrolière. Lors d’une récente interview sur la chaine RT, le président Maduro a rappelé que le Venezuela percevait 50 milliards de dollars pour ses exportations pétrolière en 2015. Aujourd’hui, il ne rentre que 4 milliards dans les caisses de l’Etat vénézuélien. Nous entendons de manière permanente que la situation économique est du á la gestion du président Maduro et de son équipe, mais quel politicien au monde, quel économiste pourrait renverser la situation dans un contexte pareil? 
L’économiste états-unien Jeffrey Sachs, responsable des thérapies de choc ultra-libéral dans les années 90 et donc peu enclin á défendre le président Maduro, a annoncé dans un rapport que sans le blocus, le Venezuela serait sorti de la crise fin 2016. La traque organisé des navires et des potentiels acheteurs, qui oblige le Venezuela à jouer au chat et à la souris (cf. le deuxième article) ne s’arrête pas au pétrole. Tous les cargos transportant des aliments vers le Venezuela ont aussi été sanctionnés. Le pays Bolivarien peine énormément à trouver des armateurs pour exporter son brut et importer des produits de première nécessité. Les attaques mis en place par les Etats-Unis et leurs alliés sont un véritable crime contre l’Humanité. Dans une interview au Financial Times datant du 7 juillet 2019, Thomas Shannon (ex Secrétaire d’Etat adjoint des Etats-Unis en 2017)  compare le blocus des Etats-Unis contre le Venezuela « aux bombardements des alliés contre Dresde ou Tokyo. en 1945 ». Le haut diplomate des USA ajoute que les sanctions « détruisent le Venezuela comme pays et comme société, et causent un énorme dommage au Peuple vénézuélien ». Et il rajoute « C’est incroyable que certaines personnes puissent le nier ». Non seulement nous devons en prendre conscience mais nous devons faire connaitre cette réalité autour de nous.
Romain Migus

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Le Venezuela ralentit sa production de pétrole et le mélange de pétrole extra-lourd à mesure que les stocks augmentent
Marianna Parraga, Mircely Guanipa
18 septembre 2019
MEXICO CITY/PUNTO FIJO, Venezuela (Reuters) – La compagnie pétrolière d’État vénézuélienne PDVSA a suspendu certains mélanges de pétrole brut et réduit sa production en raison de l’augmentation des stocks et des sanctions américaines qui font fuir acheteurs et affréteurs, selon des documents, sources et données internes à l’entreprise.
Washington a imposé cette année plusieurs séries de sanctions à l’encontre de PDVSA pour tenter d’évincer le président socialiste Nicolas Maduro, dont la réélection en 2018 n’a pas été reconnue par l’opposition et la plupart des démocraties occidentales.
Ces mesures interdisent aux entreprises américaines d’acheter le pétrole de PDVSA, privant ainsi le Venezuela de son ancienne destination principale pour les exportations, et effrayent d’autres clients, car les autorités américaines menacent également les entreprises étrangères de sanctions si elles « aident matériellement » l’administration Maduro.
En conséquence, les stocks de pétrole brut du pays de l’OPEP ont fortement augmenté depuis la fin août pour atteindre plus de 38 millions de barils, le niveau le plus élevé depuis le début de 2018, selon la société de renseignements Kpler. La capacité de stockage de pétrole brut du Venezuela est d’environ 65 millions de barils, mais de nombreux réservoirs sont inactifs en raison du manque d’entretien.
« Le stockage est presque au maximum de sa capacité. Nous ne sommes qu’à quelques jours de l’arrêt forcé de la production de certains gisements de pétrole dans l’Est du pays », a déclaré un dirigeant de PDVSA.
Le portefeuille de clients de PDVSA s’est rétréci, la société russe Rosneft absorbant désormais environ les deux tiers des exportations de pétrole vénézuéliennes destinées à la revente en Asie. Jusqu’à présent, en septembre, seuls trois clients sont recensés pour les programmes de chargement de PDVSA: Rosneft (Russie), Repsol (Espagne) et Cubametales (Cuba).
Les sanctions ont également réduit le nombre d’opérateurs de tankers pétroliers prêts à charger du brut vénézuélien, et ont affecté fortement l’entrée de devises à PDVSA pour payer les sous-traitants et les fournisseurs, ce qui a eu pour conséquence de réduire la production, selon des sources et des documents internes détaillant les luttes de l’entreprise publique.
En août, la production vénézuélienne de pétrole brut a baissé de 60 % par rapport à janvier pour s’établir à 979 400 barils par jour (b/j), selon les chiffres non officiels de PDVSA estimés par Reuters. Les exportations pétrolières du pays se sont élevées à 770 000 barils par jour le mois dernier et le nombre d’appareils de forage en activité a chuté à 25, comparativement à 48 il y a deux ans.
Réductions
L’installation destiné au mélange du pétrole extra-lourd, Petropiar, situé près du terminal de Jose, exploitée par PDVSA et la société américaine Chevron Corp, a suspendu ses activités la semaine dernière. La production de brut extra-lourd a été réduite de moitié sur le champ pétrolier associé au projet dans la ceinture de l’Orénoque à partir de mardi, selon un connaisseur de la situation qui a parlé sous couvert d’anonymat.
Chevron a par ailleurs remis en cause les projets qui la lie au Venezuela et à PDVSA. L’entreprise publique vénézuélienne n’a pas répondu à une demande de commentaires.
Le pétrole extra-lourd extrait de la ceinture de l’Orénoque doit être mélangé à des bruts plus légers pour créer des qualités exportables comme le brut lourd phare Merey du Venezuela.
Avec l’arrêt des opérations de mélange de Petropiar, la production de Merey a été ralentie. Le projet voisin de Petrosinovensa, exploité par PDVSA et China National Petroleum Corp (CNPC), a réduit sa production de 20 000 barils par jour la semaine dernière, selon le même document PDVSA.
« Petropiar est hors service à cause des stocks élevés de Merey. La première installation de Petrosinovensa est en service, la production a été ajustée à 72 000 barils par jour. La deuxième installation est en train de faire recirculer le brut « , dit-il.
Sur l’ensemble des stocks du pays, 19,6 millions de barils se trouvent stocké dans le plus grand port pétrolier du Venezuela- le terminal de Jose sur la côte Est – en attente de navires et de clients dès mardi, selon Kpler.
PDVSA s’est récemment recentré sur le Merey, cherchant à trouver de nouveaux clients en Asie dans ce contexte de sanctions. Mais elle a également provoqué une accumulation plus rapide des stocks dans l’est du pays, en particulier depuis que la CNPC a cessé de charger du pétrole vénézuélien en août [le 16/08/2019, par peur des sanctions, NDT].
La production dans l’ouest diminue
Au large de la côte ouest du pays, une poignée de navires servent de lieu de stockage flottant depuis des mois, selon les données de Refinitiv Eikon.
« Nous avons actuellement trois pétroliers pleins de pétrole brut en attente de navires qui chargeraient dans le cadre d’opérations de transport de navire à navire. Mais les navires ne sont pas arrivés », a déclaré un inspecteur de l’un des ports de l’ouest de PDVSA.
La production avait déjà ralenti dans les champs de l’ouest du Venezuela, mais à la difficulté pour trouver des navires pour l’exportation s’est ajoutée la difficulté de stockage, forçant PDVSA et ses coentreprises à réduire davantage ou à suspendre la production dans les champs pétrolifères comme Tia Juana, Lagunillas, Bachaquero et Boscan, selon des sources bien informées de cette situation.
« Nous n’avons plus de capacité de stockage pour les 21 champs de l’état de Zulia. Nous produisons environ 140 000 barils par jour, principalement pour l’obstruction  des pipelines « , a déclaré un travailleur du lac Maracaibo, la deuxième région productrice en importance du Venezuela.
Les exportations pétrolières vénézuéliennes tombent à leur niveau le plus bas en 2019 en raison des sanctions étatsuniennes 
Marianna Parraga, Mircely Guanipa
3 septembre 2019
(Reuters) – Les exportations pétrolières du Venezuela ont chuté en août à leur plus bas niveau pour l’année 2019, selon des rapports internes et des données de Refinitiv Eikon. L’entreprise, souffre de l’arrêt des achats du deuxième plus gros client du pays, China National Petroleum Corp (CNPC), à cause de la sévérité des sanctions américaines.
Les exportations globales de pétrole brut et de produits raffinés de la compagnie pétrolière publique Petroleos de Venezuela (PDVSA) et de ses coentreprises ont diminué le mois dernier, passant de 992 565 b/j en juillet à quelque 770 000 barils par jour (b/j) et 1,13 million b/j en juin, selon les données révisées.
Le mois dernier [le 16/08/2019,NDT], la CNPC chinoise, gérée par l’État asiatique, a annulé les chargements de brut vénézuélien prévus pour le mois d’août, après que Washington eut publié un décret exécutif qui gelait les biens du gouvernement vénézuélien sur le sol américain et averti les entreprises étrangères qu’elles pourraient également faire face à des sanctions si elles faisaient affaire avec PDVSA.
PDVSA est responsable de la livraison du pétrole aux entreprises chinoises pour rembourser les milliards de dollars prêtés au Venezuela. Les États-Unis ont redoublé d’efforts pour évincer le président Nicolas Maduro, dont la réélection en 2018 est jugée illégitime par la plupart des pays occidentaux.
Cette baisse survient alors même qu’un certain nombre de cargaisons se déplacent sur des navires-citernes qui n’allument pas leurs transpondeurs de signalisation lorsqu’ils approchent ou quittent les eaux vénézuéliennes, selon les données de suivi des navires de Refinitiv Eikon. Il est donc difficile de mesurer pleinement les exportations et de confirmer leur destination de livraison.
Depuis la suspension, la compagnie pétrolière d’État russe Rosneft a augmenté sa part du pétrole vénézuélien, la Chine étant la première destination. Rosneft a augmenté sa part dans les exportations totales de PDVSA, à 65% en août contre 49% en juillet, selon les rapports commerciaux internes de PDVSA.
PDVSA n’a pas répondu à une demande de commentaires.
La deuxième destination en importance du pétrole vénézuélien le mois dernier était l’Europe, où la compagnie pétrolière espagnole Repsol a continué d’échanger ses produits raffinés contre du brut vénézuélien. La troisième destination était Cuba, l’allié politique le plus proche de Maduro. Les expéditions vers l’Inde, qui était auparavant un marché privilégié pour le brut vénézuélien, sont tombées à un seul chargement d’un million de barils, selon les données.
Une course silencieuse
Entre juin et juillet, le très gros transporteur de brut (VLCC) Marina M a cessé d’émettre des signaux lorsqu’il s’est approché pour prendre une cargaison au terminal de Jose au Venezuela, selon le service indépendant TankerTrackers.com et des images satellite de Planet Labs Inc consultés par Reuters.
Le pétrolier battant pavillon maltais a chargé du brut vénézuélien le 12 juillet. Son transpondeur a été récupéré la semaine dernière après un voyage au port de Sikka en Inde. Le navire est maintenant en attente de déchargement, selon Refinitiv Eikon.
« Il s’agissait d’une grande lacune sur le plan géographique en matière de données satellitaires « , a déclaré Samir Madani, cofondateur de TankerTrackers.com.
Le droit international exige que les navires en mer soient équipés d’un dispositif de repérage par satellite. Toutefois, le capitaine d’un navire peut, à sa discrétion, éteindre l’appareil pour des raisons de sécurité avec l’autorisation de l’État du pavillon du navire.
D’août à début septembre, deux autres navires ont disparu du suivi des navires alors qu’ils se trouvaient dans les eaux vénézuéliennes. Le pétrolier Tanker Patmos I a cessé de signaler son emplacement lors d’une manœuvre de transbordement au port d’Amuay au Venezuela, et le Princess Mary a fait la même chose lors du chargement au port de Jose, selon les données de suivi du navire. Les deux battent drapeau libérien.
Le Marina M et le Princess Mary ont été affrétés par Rosneft. Tipco Asphalt a affrété le Patmos I, selon les documents de la PDVSA.
Eastern Mediterranean Maritime Ltd, qui gère la Marina M, a indiqué dans un courriel qu’elle n’avait jamais conclu de contrat avec PDVSA ou une entreprise sanctionnée par les États-Unis. L’entreprise a refusé de commenter les détails du contrat d’affrètement pour le chargement du pétrole au Venezuela, mais a noté que le transport couvrant le commerce du pétrole de Rosneft avec la nation sud-américaine ne viole pas les sanctions américaines.
Rosneft, Tipco et les exploitants des autres navires, Navig8 Group et Dynacom Tankers, n’ont pas répondu aux demandes de commentaires.
Certains navires-citernes allant du Venezuela à Cuba n’ont pas non plus signalé leur position. En août, les pétroliers Manuela Saenz, Sandino, Carlota C, Giralt, Terepaima et Lone Star se sont rendus à Cuba pour livrer près de 70 000 baril par jour de brut et de produits vénézuéliens, selon les données.